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Aller derrière l’eau. Autrement dit, aller à l’aventure ou étudier en Europe, aux Etats-Unis, au Canada… C’est le rêve caressé par la majorité des jeunes ivoiriens. Qu’il ait un emploi modestement rémunéré ou qu’il soit au chômage, l’idée de partir en Occident lui a déjà effleuré l’esprit. Au moins une fois. Ce qui fait la différence entre les deux catégories, c’est l’aptitude à franchir le Rubicon. Certains y pensent dès leur prime jeunesse mais n’ont jamais rien tenté.

D’autres se débattent et l’aventure tourne court. Les raisons du départ coûte que coûte pour l’Eldorado européen diffèrent donc d’un individu à un autre.

Pour certains, on quitte le pays, la famille et les amis pour aller acquérir l’argent nécessaire au démarrage d’une activité lucrative dans le pays d’origine, trouver de quoi améliorer le bien-être de la grande famille restée au bled. Mais dans le même temps, quand on voit que des candidats à l’immigration disposent de 2 à 3 millions de FCFA pour financer leur voyage, on se dit qu’ils peuvent déjà entreprendre ici. Pas donc besoin de partir souffrir ailleurs.

«Mon ami a très vite réussi en Europe, pourquoi pas moi», se disent certains candidats à l’aventure, après avoir vu des photos d’amis sur les résaux sociaux notamment Facebook. Ainsi avec la bénédiction des parents, on vend bijoux, maisons…pour aller chercher à améliorer la situation de la famille. Dans les pays où règne le désordre politique, il faut fuir le joug de la dictature ou la répression. C’est le cas notamment des réfugiés politiques.

Pour des étudiants ou jeunes cadres dans l’administration ou le privé, on va à la recherche d’une formation de qualité. Ou encore pour une autre catégorie, on est poussé par le snobisme culturel qui fait que l’Occident est vu comme le paradis. Il faut aller en ‘’bengue’’ pour revenir faire comme les autres qui ont donc réussi là-bas. Rouler dans les belles voitures, construire sa maison ou avoir les plus belles filles de son ancien quartier. Ces signes extérieurs de richesse poussent beaucoup à aller à l’aventure.

Sans vouloir être exhaustif sur les raisons du départ des immigrants, on peut écrire qu’ils vont chercher ailleurs ce qu’ils n’ont pas forcément chez eux. Et on essaie par tous les moyens d’avoir un visa pour effectuer le voyage. Les conditions d’obtention du précieux sésame par le circuit officiel étant difficiles, les jeunes gens sont plus enclins à emprunter des voies clandestines, «le montage» comme on le disait en Côte d’Ivoire. La méthode consistait à emprunter le passeport d’un parent, d’un ami qui a obtenu le visa par la voie normale et y coller la photo d’un autre. Mais quand tout cela a échoué, parce que cela ne marche plus depuis belle lurette, on se tourne vers des filières clandestines de passeurs. Les boat-people ont donc fait leur apparition dans les années 2000. Sur les côtes italiennes ou espagnoles, on voit de plus en plus de bateaux pleins de jeunes désespérés s’échouer ; Faisant de nombreux morts. La soif de partir est toujours réelle pour certaines personnes, quel que soit l’argument que l’on pourrait leur opposer.

Et les candidats à l’immigration clandestine, de plus en plus jeunes, avec même des élèves, des jeunes dames…se multiplient au départ de la ville de Daloa, qui est devenue tristement célèbre avec ce fléau.

Qu’à cela ne tienne.

Qu’est-ce qui empêche nos Etats à réunir les conditions pour maintenir leurs bras valides sur place. Il serait tellement simple de faciliter les conditions d’obtention d’un terrain pour construire sa maison, d’obtenir une subvention comme au Maroc pour l’achat de voitures et de maisons à travers la banque de l’habitat, de faciliter les conditions pour aller à La Mecque, pour faire des études qualifiantes et des formations continues…

Par Stéphane Badobré

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