« J’ai l’insigne honneur, au nom de mes collègues Conseillers aux Droits de l’Homme, du Secrétaire Général, des Présidents des Commissions Régionales et de l’ensemble du personnel du Conseil National des Droits de l’Homme (CNDH), de vous remercier pour cette cérémonie de présentation de notre Rapport annuel 2024 sur l’état des Droits de l’Homme et de son rapport d’activités.
Excellence Monsieur le Président,
L’article 3 de la Loi n°2018-900 du 30 novembre 2018 instituant le CNDH stipule que : « Le CNDH élabore un rapport annuel sur l’état des droits de l’Homme et un rapport d’activités présentés au Président de la République, au Président de l’Assemblée nationale et au Président du Sénat. La présentation à l’Assemblée nationale et au Sénat donne lieu à débats. Ces rapports sont rendus publics. ».
Le CNDH sacrifie aujourd’hui à cette exigence légale, celle de présenter au Président de l’Assemblée Nationale, son rapport annuel sur l’état des Droits de l’Homme en Côte d’Ivoire.
Après la remise officielle,
• le 12 novembre 2025, à Son Excellence Monsieur le Président de la République, représenté à cette rencontre par Son Excellence Monsieur le Vice-Président ;
• le 28 novembre 2025 à Son Excellence Madame la Présidente du Sénat,
nous vous présentons ce rapport qui sera soumis à débats sous votre haute autorité au sein de cet hémicycle.
Excellence Monsieur le Président,
Avant de poursuivre mon propos, je voudrais solennellement, au nom du Conseil National des Droits de l’Homme, vous réitérer nos vives félicitations pour le travail que vous abattez à la tête de cette prestigieuse institution ainsi qu’en qualité de Président de l’Assemblée parlementaire francophone (APF).
Je vous adresse nos sincères remerciements pour le soutien constant que vous apportez à la mise en œuvre du mandat du Conseil National des Droits de l’Homme. Vos conseils avisés, votre disponibilité et la qualité de votre écoute constituent pour nous une source d’inspiration et de motivation dans le cadre de nos missions.
Excellence Monsieur le Président,
Vos initiatives telles que le projet « Parlementaire en réseau pour la jeunesse » ainsi que votre engagement en faveur d’une Francophonie plus inclusive, équitable et porteuse d’avenir pour les jeunes générations, marquent la nécessité de poursuivre la réflexion sur les responsabilités des États francophones face aux violations des droits de l’Homme provoquées par les crises qui secouent notre monde. Avec beaucoup de pragmatisme, vous affirmez à ce propos et je cite : « l’Assemblée parlementaire francophone se doit de définir des axes avec une hiérarchisation des projets. Elle doit intervenir auprès des Parlements pour faire valoir l’état de droit, l’égalité homme-femme, cela ne doit pas se limiter à des réflexions. » (Fin de citation)
Excellence Monsieur le Président,
Vous avez toujours joint l’acte à la parole. Votre haute implication dans les activités de renforcement des capacités, de sensibilisation du CNDH et les sessions d’orientation avec les honorables députés, attestent de la qualité de l’interaction entre le CNDH et votre institution.
De plus, lors de nos précédents passages devant la Chambre basse du Parlement ivoirien, nous avons été l’objet d’une délicate attention et d’une écoute particulière. Les débats ont toujours été constructifs et enrichissants.
Excellence Monsieur le Président,
Je vous exprime toute la gratitude du CNDH pour votre accompagnement constant ainsi que pour tout l’intérêt porté par l’Assemblée Nationale aux travaux de l’organisme national de défense des Droits de l’Homme de la Côte d’Ivoire.
Aussi, nous tenons à vous assurer, Excellence Monsieur le Président, de notre disponibilité à vous accompagner pour le succès de votre mission.
Je remercie les honorables Députés de la Nation, dont je salue la présence si distinguée.
Leur mobilisation hier comme aujourd’hui, marque tout l’intérêt qu’ils portent aux droits de l’homme.
Excellence Monsieur le Président,
L’actualité des Droits de l’Homme nous offre deux évènements majeurs en ce mois de décembre : les 16 jours d’activisme contre la violence basée sur le genre et la Journée internationale des Droits de l’Homme célébrée chaque 10 décembre dont le thème de cette édition est : « Droits humains, nos essentiels ».
À l’occasion des 16 jours d’activisme, l’édition 2025 nous rappelle que les féminicides et les violences numériques ne sont pas seulement des faits divers, mais des violations graves des droits de l’Homme qui appellent une mobilisation nationale.
Chaque féminicide est un drame irréparable, un échec collectif. Chaque violence en ligne (cyberharcèlement, chantage, diffusion non consentie d’images, menaces…) prolonge et amplifie les violences déjà subies hors ligne.
Face à cette situation, nous disons que la protection des femmes et des filles n’est pas négociable.
Le rôle des députés est déterminant dans ce combat. En tant que législateurs, honorables députés, vous avez ont la responsabilité :
• d’adapter et de renforcer le cadre juridique pour prévenir, sanctionner et réparer ;
• de veiller à ce que les lois protègent les victimes et responsabilisent les auteurs ;
• d’encourager la mise en place de dispositifs nationaux de prise en charge, d’alerte et de prévention ;
• de promouvoir l’égalité et la non-discrimination dans toutes les politiques publiques.
L’Assemblée Nationale, par sa voix, peut faire évoluer les mentalités, sécuriser les espaces physiques comme numériques et garantir que les violences de genre ne soient plus tolérées ni minimisées.
De son côté, le CNDH continuera :
• de documenter les cas de violences basées sur le genre et produit des alertes régulières ;
• d’accompagner les survivantes par ses mécanismes de protection, d’écoute et d’orientation ;
• de réaliser des campagnes de sensibilisation sur les violences numériques et leurs conséquences ;
• de recommander des réformes législatives et institutionnelles pour lutter plus efficacement contre les féminicides et les violences en ligne;
• de former les acteurs (forces de défense et de sécurité, magistrats, leaders communautaires) sur la prise en charge et la prévention.
Ces efforts s’inscrivent dans une conviction forte : aucune femme, aucune fille ne doit vivre dans la peur, ni chez elle, ni dans la rue, ni sur Internet.
Relativement à la Journée internationale des droits de l’homme, nous rappelons que la lutte contre les violences faites aux femmes n’est pas un combat isolé, mais une composante essentielle de la dignité humaine. C’est un combat que nous gagnerons en restant unis : institutions, élus, organisations, communautés et citoyens.
Il est essentiel de rappeler que les droits de l’Homme ne sont pas un supplément dans la construction d’une société, mais le socle sur lequel reposent la dignité, la sécurité et la stabilité de toute nation. Ils constituent nos essentiels, car ils définissent ce que nous devons à chaque citoyenne et à chaque citoyen : respect, égalité, liberté, justice.
Le rôle des députés s’inscrit naturellement dans cette dynamique. Le mandat parlementaire n’est pas seulement un mandat politique : c’est un mandat de protection, un mandat de veille et de promotion des droits de l’Homme. Chaque loi examinée, adoptée ou amendée doit être regardée à travers le prisme de l’impact qu’elle aura sur les droits de l’Homme. Célébrer cette journée, c’est réaffirmer que les droits de l’Homme ne sont pas des idéaux théoriques : ils sont concrets, ils sont autour de nous et en nous. Ils notre boussole et notre avenir.
Excellence Monsieur le Président,
Par son rôle de vigie, le CNDH œuvre, entre autres, à :
• alerter le Gouvernement sur les violations et atteintes aux droits de l’Homme ainsi que les menaces sur la paix,
• sensibiliser, surveiller et émettre des recommandations en lien avec les politiques publiques.
C’est pourquoi, le CNDH s’est impliqué dans la présidentielle du 25 octobre 2025 par le déploiement de 2350 observateurs, la sensibilisation dans 112 localités et par notre système d’alerte précoce. Je puis vous assurer qu’il s’impliquera dans les élections législatives du 27 décembre 2025.
Excellence Monsieur le Président,
Notre obligation quant à la question électorale n’est pas seulement juridique, elle est aussi morale et politique.
Juridique, parce que les droits de l’homme sont inscrits dans notre Constitution, dans nos lois et dans les engagements internationaux.
Morale, parce que la dignité humaine n’est pas négociable et que la confiance des citoyens repose sur la certitude que leurs droits sont respectés.
Politique, parce que sans le respect des droits des Droits de l’Homme, aucune élection ne peut être qualifiée de démocratique.
Je voudrais, avant de poursuivre mon propos, saisir cette occasion pour exprimer nos très vives félicitations à Son Excellence Monsieur le Président de la République, pour sa réélection à la magistrature suprême ainsi que pour les progrès réalisés en matière de droits de l’Homme ces dernières années.
Grâce à la vision de Son Excellence Monsieur le Président de la République, sur les droits de l’Homme, notre pays siège au Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies, à Genève. Le CNDH vient d’être proposé à la ré-accréditation, le 5 novembre 2025, au statut A de l’Alliance Mondiale des Institutions Nationales des Droits de l’Homme, après l’évaluation par 19 Experts le 28 octobre dernier.
Excellence Monsieur le Président,
L’obtention du Statut A signifie qu’une INDH est conforme aux standards internationaux, par la disposition constitutionnelle qui la prévoit, par sa loi habilitante, par le budget alloué à son fonctionnement et à la réalisation de son mandat ainsi que par ses activités en toute indépendance, par ses méthodes de coopération et de collaboration avec les institutions nationales et internationales.
Excellence Monsieur le Président,
Certains de nos compatriotes continuent de se poser la question suivante : pourquoi le CNDH présente- t-il son rapport à l’Assemblée Nationale ?
Je voudrais, avec votre permission, saisir cette occasion pour leur apporter les éléments de réponse suivants.
Excellence Monsieur le Président,
Conformément aux principes de Paris, le texte international auquel est adossée la création des Institutions Nationales des Droits de l’Homme, les INDH doivent développer avec les Parlements, une interaction en vertu des Principes de Belgrade, adoptés en 2012 en Serbie, par tous les Etats membres des Nations Unies, et qui disposent que « les Institutions Nationales des Droits de l’Homme (INDH), les Parlements et tous les parlementaires devraient œuvrer ensemble pour la sensibilisation et les campagnes d’éducation et encourager leur participation aux événements, conférences et activités organisées pour la promotion des droits de l’Homme ».
Cette interaction doit être renforcée eu égard au rôle essentiel que joue l’Assemblée Nationale dans l’action législative et aux défis en matière de droits de l’homme auxquels fait face notre pays.
Au-delà des textes, sur le terrain, l’Assemblée Nationale est un acteur clé de la gouvernance démocratique, doté de pouvoirs législatifs, de contrôle et d’évaluation des politiques publiques.
La collaboration entre l’Assemblée Nationale et le CNDH, renforce la qualité de notre démocratie, la protection des populations et l’efficacité des politiques publiques. Mais comment ? Par quels mécanismes ?
Premièrement. L’interaction entre l’Assemblée Nationale et le CNDH permet de renforcer la législation nationale en permettant d’intégrer dans les textes législatifs, les normes internationales et les meilleures pratiques en matière de droits humains.
Deuxièmement. Cette coopération permet aux honorables Députés de la Nation d’anticiper les risques de contradictions avec les engagements internationaux de notre pays.
Troisièmement. La collaboration Assemblée Nationale-CNDH améliore le contrôle de l’action gouvernementale à travers nos rapports et recommandations, qui peuvent guider les parlementaires dans l’analyse des politiques publiques.
Quatrièmement. Cette collaboration apporte également au député une meilleure connaissance des enjeux réels de terrain, un appui pour la prise de décision et le travail législatif, tout en proposant des lois plus protectrices et mieux adaptées.
Enfin. Elle permet d’évaluer l’impact humain des projets de loi, comprendre les tensions sociales, communautaires ou politiques à travers les sessions d’orientations, anticiper des crises locales ou nationales, disposer d’informations précises et actualisées, mieux suivre les recommandations internationales (EPU, mécanismes de New York et Genève), évaluer les politiques gouvernementales en matière de justice, sécurité, santé, éducation, cohésion sociale.
Cette mutualisation des efforts et des expertises, cet appui que vous nous apportez, permet in fine de bénéficier d’un accès plus direct aux débats et décisions parlementaires pour une meilleure performance dans l’accomplissement de notre mandat. Les résultats et les chiffres l’attestent.
Excellence Monsieur le Président,
Depuis 2019, le CNDH a enregistré 17.614 plaintes des populations, dont 16.136 ont été traitées. Il a également enregistré et traité 5875 cas de Violences basées sur le genre (VBG).
En outre, du 1er janvier au 31 octobre 2025, le CNDH a réalisé des enquêtes et études réalisées, notamment sur :
• les comités sous-préfectoraux de gestion foncière ;
• les femmes élues députés en Côte d’Ivoire de 1959 à 2025 ;
• l’accès aux soins de santé des personnes privées de libertés dans 40 maisons d’arrêt et de correction ;
• la resocialisation de femmes détenues dans les 34 MAC ;
• l’impact des opérations de déguerpissements sur l’exercice des droits de l’homme ;
• l’effectivité de l’accès à la Couverture Maladie Universelle ;
• la liberté d’expression en Côte d’Ivoire.
Excellence Monsieur le Président,
La présentation de notre rapport aux institutions consiste en une séance d’informations et de clarifications sur les préoccupations que peuvent susciter chez les députés le contenu dudit rapport.
Cependant, conformément aux « Principes de Paris » qui font obligation aux Etats de préserver leur indépendance en toute circonstance, les débats devant la représentation nationale ne visent pas à amender le contenu du rapport national sur les droits de l’homme élaboré par une INDH.
Nous sollicitons à cet effet, votre précieuse contribution en vue d’un meilleur suivi des recommandations de ce rapport.
Excellence Monsieur le Président,
Je vous remercie pour toute l’attention que vous accorderez à la présentation du rapport annuel 2024 sur l’état des droits de l’Homme en Côte d’Ivoire, qui m’échoit en ma qualité de Présidente du CNDH.
I. L’ETAT DES DROITS DE L’HOMME
Excellence Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les honorables Députés de la Nation,
Distingués invités,
Le rapport annuel 2024 du CNDH que j’ai l’honneur de vous présenter dans ses grands axes, comporte trois parties :
la première partie est consacrée aux progrès relatifs aux droits civils et politiques, aux droits économiques, sociaux, culturels, aux droits catégoriels et aux droits dits de solidarité ;
la deuxième partie a trait aux défis relatifs auxdits droits cités plus haut et
la troisième partie porte sur les activités de promotion et de protection des droits de l’Homme.
Excellence Monsieur le Président,
AU TITRE DES PROGRES ENREGISTRES EN 2024,
Au niveau des Droits civils et politiques, l’année 2024 a été marquée par plusieurs avancées majeures, à savoir :
L’abolition de la peine de mort par la ratification, le 3 mai 2024, du deuxième protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, confirmant son abolition définitive.
La protection contre les disparitions forcées à travers par la ratification de la Convention internationale correspondante, le 6 juin 2024, renforçant la prévention et la répression de ces actes.
L’accès à la justice par l’adoption d’une loi sur l’organisation des juridictions, créant de nouveaux tribunaux et rapprochant la justice des citoyens, le 18 septembre 2024
La lutte contre l’extrémisme violent par la mise en œuvre de programmes de prévention dans les zones frontalières du nord.
La lutte contre la corruption à travers l’adoption, le 12 juin 2024 par le Gouvernement, de la Stratégie nationale de la lutte contre la corruption 2024–2028, l’amélioration de l’indice de perception de la corruption (40/100), la création de Comités Locaux d’Intégrité et le développement du mécanisme multi-acteurs piloté par le CNDH.
Les libertés d’association et de manifestation par la prise d’une ordonnance (n°2024-368) pour réguler la vie associative et renforcer la transparence des organisations de la société civile.
Le Droit à l’identité par la prorogation du délai de déclaration spéciale de naissance et généralisation du système numérique “Cityweb” pour les maternités.
La protection des personnes privées de liberté à travers la modernisation des infrastructures policières et de la gendarmerie selon les normes internationales pour prévenir les traitements inhumains et dégradants.
Relativement aux Droits économiques, sociaux et culturels (DESC),
Les progrès incluent une extension de la Couverture Maladie Universelle avec 16,2 millions de personnes enrôlées, une amélioration de l’accès à l’éducation de qualité grâce à la mise en œuvre des conclusions des États Généraux de l’Éducation et un soutien renforcé à l’inclusion scolaire.
Toujours dans les progrès, concernant les Droits catégoriels,
Au niveau de la lutte contre le travail des enfants
La Côte d’Ivoire enregistre des progrès significatifs, avec une baisse de 32% dans le secteur du cacao, suite à des actions intensives.
Au niveau du droit à la santé des enfants en milieu carcéral
Les conclusions d’une enquête du CNDH réalisée en juillet 2024, montrent que dans six des sept établissements pénitentiaires visités, les mineurs bénéficient d’une prise en charge dès leur entrée, et que les infirmeries sont dotées de personnel soignant pour les enfants malades.
De plus, les mineurs reçoivent une alimentation adéquate en qualité et en quantité, servie aux heures habituelles des repas.
Concernant le droit à la santé sexuelle et reproductive
Notre pays enregistre une intensification des initiatives de planification familiale, l’amélioration de l’accès aux contraceptifs, la formation des agents de santé, et l’organisation de semaines nationales dédiées à la planification familiale.
Au niveau de la lutte contre les Violences Basées sur le Genre (VBG)
L’existence de plateformes VBG sous la tutelle du Ministère de la Femme, de la Famille et de l’Enfant reparties sur l’ensemble du territoire, un puissant levier dans la prise en charge des violences basées sur le genre.
Au niveau de la protection des migrants
La réintégration des Ivoiriens de retour et la lutte contre l’émigration irrégulière, un dispositif d’accompagnement a été mis en place. Le 20 mars 2024, un soutien économique a été accordé à 96 bénéficiaires, dont 28 femmes, par le Ministère de la Promotion de la Jeunesse et celui de l’Intégration africaine.
Au niveau de la représentativité des femmes en situation de handicap dans l’administration publique
Le recrutement de 200 nouveaux agents, en 2024, portant ainsi leur effectif à 2307 dans l’administration publique, la création, le 4 juillet 2024, des organes de gouvernance du Fonds d’Insertion Professionnelle dans le secteur privé et l’inclusion sociale des femmes en situation de handicap dans l’administration publique, conformément aux principes de la CDPH.
Excellence Monsieur le Président,
AU TITRE DES DEFIS A LA REALISATION DES DROITS DE L’HOMME,
Malgré les progrès réalisés par l’Etat de Côte d’Ivoire, des défis restent à relever au niveau des Droits civils et politiques, des Droits économiques sociaux culturels ainsi que des Droits catégoriels.
Au niveau des droits civils et politiques, le Conseil relève :
• L’insuffisance du cadre juridique de la lutte contre la corruption et des infractions assimilées marquée par les faiblesses et les limites de l’accès à la plateforme SIGNALIS pour les populations rurales.
• Les contours insuffisamment définis de la liberté d’association et de réunion pacifique dont la récente ordonnance n°2024-368 du 12 juin 2024 sur la société civile suscite des critiques pour son ingérence administrative excessive et des inquiétudes quant à la protection des acteurs de la société civile.
• Un déficit de modernisation de l’état civil qui induit un manque de ressources et d’équipements modernes pour assurer un enregistrement efficace, la digitalisation totale du système, un défi à relever dans les différents centres d’état civil tant au niveau des mairies que dans les sous-préfectures.
• La situation des détenus de nationalité étrangère dans les établissements pénitentiaires, dont 3211 ne peuvent lire et écrire en français sur 6740 détenus visités. Le reste ne bénéficie pas de l’assistance consulaire.
• Sur les détenus en attente de jugement, 4547 sur 23 515 détenus attendent un premier jugement, 3 698 au-delà des délais, 3 291 ont interjeté appel, et 520 ont formé un pourvoi en cassation.
Au chapitre des droits économiques, sociaux et économiques,
Au niveau de la Santé, les conclusions de l’enquête réalisée en 2024 par le CNDH, révèlent que sur 572 personnes disposant de la carte CMU, 257 usagers, soit 45% disent ne pas bénéficier des prestations de la CMU.
Quant à l’Éducation, les conclusions d’une enquête réalisée par le CNDH, dans 415 établissements scolaires au cours de l’année académique 2023-2024 révèlent que 272 présentent un déficit d’enseignants pour le cycle primaire et 143 pour le secondaire.
Au niveau des Droits des personnes victimes de déguerpissement,
20 opérations de déguerpissements à Abidjan, ont impacté le droit au logement et les conditions de vie des populations concernées.
Au niveau des droits catégoriels
Au niveau du Travail des enfants,
Le rapport identifie trois principaux défis : concernant le travail des enfants en Côte d’Ivoire.
Premièrement, il y a une perception inappropriée de cette notion parmi les populations urbaines et rurales.
Deuxièmement, il existe une méconnaissance des lois sur l’éducation et des efforts de l’État pour lutter contre ce fléau, ce qui affecte l’accès aux services sociaux et à l’autonomisation des populations rurales.
Enfin, la capacité d’accueil pour les enfants victimes est insuffisante, avec 3 centres existants sur le territoire national.
Quant au droit aux soins de santé des enfants incarcérés
Les conclusions d’une enquête menée en juillet 2024 par le CNDH, portant sur 113 enfants dans des Centres d’observation des mineurs, révèlent :
• une disponibilité insuffisante du personnel médical et l’absence de personnel soignant permanent ;
• une consommation régulière de stupéfiants par une majorité d’enfant, soulignant une insuffisance dans leur prise en charge ; et
• une surpopulation carcérale inquiétante au COM de Bouaké, qui héberge des mineurs sous Ordonnance de Garde Provisoire et en détention provisoire
Concernant les droits sexuels et reproductifs, le rapport met en lumière les insuffisances dans l’application du Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples de Maputo. Le CNDH indique qu’en matière de droits sexuels et reproductifs, bien qu’il y ait eu des évolutions juridiques avec l’ordonnance du 11 juin 2024, l’article 427 du Code Pénal ne respecte pas la condition du fœtus énoncée dans l’article 14. 2 du Protocole.
Sur la protection des Migrants, Le rapport relève l’ignorance des règles par les migrants et l’absence d’une politique migratoire ce qui entraine des obstacles à la pleine jouissance de leurs droits.
Au niveau de la prise en charge holistique des victimes des Violences Basées sur le Genre, le CNDH a enregistré en 2024, 1.398 cas de violences basées sur le genre (VBG) marquant une baisse de 2,58% par rapport à l’année précédente. Les défis identifiés incluent des capacités locales limitées, et un besoin d’accompagnement holistique pour les victimes. Aussi, les plateformes de protection mentionnent un manque de ressources adéquates.
La représentativité des femmes en situation de handicap est jugée faible dans l’administration publique, avec seulement 278 femmes recrutées de façon dérogatoire sur un total de 2307.
Excellence Madame la Présidente,
Les activités du CNDH ont porté aussi bien sur son mandat de promotion que son mandat de protection
AU TITRE DES ACTIVITES DE PROMOTION :
Le CNDH, a poursuivi et renforcé ses initiatives à travers :
• son programme de renforcement de capacités à travers l’Université des Droits de l’Homme (UDDH) qui a permis de former 713 auditeurs en 2024.
• des campagnes de sensibilisation et éducation civique, notamment via les réseaux sociaux (“La Minute des droits de l’Homme”).
• L’organisation de la Quinzaine des Droits de l’Homme et du Prix National des Droits de l’Homme.
• Les publications spécialisées, dont des guides pratiques de lutte contre la corruption et la participation citoyenne.
AU TITRE DES ACTIVITES DE PROTECTION
Le CNDH en 2024, a enregistré 3 163 plaintes des populations sur l’étendue du territoire portant sur toutes catégories de droits, à travers ses canaux de saisine.
Sur ces 3 163, 3078 requêtes ont été traitées soit 97,31%.
AU CHAPITRE DES PERSPECTIVES,
Les perspectives du CNDH se résument, entre autres, en ces points :
• Consolider les acquis à travers l’amélioration du cadre législatif et réglementaire du CNDH par la prise en compte des recommandations des mécanismes internationaux ainsi que du CNDH, remis au gouvernement en janvier 2023
• Construire le centre international des droits de l’Homme et de la démocratie pour renforcer le programme de formation « Université des Droits de l’Homme ».
• Accroitre les ressources du CNDH afin de lui permettre de poursuivre efficacement la mise en œuvre de son mandat à la dimension de ses ambitions.
Excellence Monsieur le Président,
Au terme de cette présentation du rapport annuel 2024 qui contient les recommandations de l’institution, je voudrais réaffirmer notre engagement à accompagner le Gouvernement et toutes les institutions de la République.
Je voudrais vous remercier pour votre sollicitude à l’égard du CNDH, vos conseils avisés, votre constante sollicitude ainsi que celle de toutes les Institutions de la République, à l’endroit du Conseil National des Droits de l’Homme.
Excellence Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les honorables Députés de la Nation,
Je voudrais, pour clore mon propos, exprimer à toutes et tous, ma gratitude pour avoir distrait de votre temps pour participer à cette rencontre ainsi que pour l’attention soutenue que vous avez bien voulu prêter à cette présentation du rapport annuel 2024 sur l’état des droits de l’homme en Côte d’Ivoire.
Je vous remercie de votre aimable attention.
MOT DE FIN DE LA PRESIDENTE DU CNDH APRES LA PRESENTATION DU RAPPORT
Excellence Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les honorables Députés de la Nation,
Distingués invités,
Mesdames et Messieurs,
Je me félicite de la qualité des échanges relatifs au rapport annuel 2024 du CNDH sur l’état des droits de l’homme en Côte d’Ivoire qui vient de vous être présenté.
J’apprécie l’attention toute particulière que vous avez portée à ce rapport à travers un débat assez pertinent et constructif.
Je suis convaincue que les débats vont se poursuivre au-delà de l’hémicycle, et en d’autres circonstances, à l’effet d’enraciner les droits de l’homme dans la gouvernance et le quotidien des populations.
Excellence Monsieur le Président,
Je ne saurais clore mon propos sans vous remercier pour votre accompagnement soutenu et adresser à toutes et tous, une bonne session parlementaire.































