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Les Pékinois voient leur ciel bleu comme jamais depuis longtemps. Les Vénitiens découvrent des canaux aux eaux clarifiées. Mon amie Louise admire des oiseaux qui n’avaient pas l’habitude de picorer dans ses mangeoires. Les mesures contre le virus ont abaissé de 17 % les émissions de gaz à effet de serre.

Un nouveau monde se lèverait-il ? Pas vraiment, car pour plusieurs, le retour à la normale noircira à nouveau le ciel pékinois, brouillera les eaux vénitiennes, éloignera les oiseaux rares et augmentera les GES.

Changer, c’est difficile

À la lumière des bienfaits que semble apporter la crise sanitaire sur l’environnement, j’ai voulu savoir ce qu’en pensent mes deux mentors dans le domaine.

Pour Frédéric Legault, ancien prof universitaire qui n’en finit plus d’étudier l’impact de l’activité humaine sur la dégradation de la planète, les gains enregistrés durant la crise COVID-19 s’étioleront rapidement.

Quant à Christian Payeur, un des initiateurs de la Fondation Monique-Fitz-Back, il admet que les améliorations annoncées sont conjoncturelles et ne résisteront pas sans l’inclination des États vers un développement durable.

Pendant que le premier est convaincu de la pression irrésistible qu’exerceront les grandes entreprises pour continuer de faire comme avant la crise, le second compte sur le pouvoir des jeunes pour générer le changement.

Pour certains amis et anciens dirigeants de grands syndicats nationaux, il subsistera de petits gains. Ils anticipent une diminution du transport automobile avec le recours accru au télétravail.

Comme mes mentors, ils ne croient pas que des changements de comportement individuel s’avéreront suffisants.

Combien de pandémies ?

La dégradation de l’environnement, le réchauffement climatique, la perte de la biodiversité et la pandémie sont des phénomènes étroitement liés. La simple gestion de la crise sanitaire ne constituera pas une réponse satisfaisante pour l’avenir de l’humanité.

Bien que le gouvernement Legault ait agi avec une certaine lenteur, Frédéric reconnaît qu’il a fait pour le mieux dans la gestion de la crise. Il avait hérité d’un réseau de la santé laissé mal en point par ses prédécesseurs. Pour l’avenir, il ne voit toutefois pas de plan encourageant à travers l’obsession économique du premier ministre.

Selon Christian, chaque décision gouvernementale devrait être tournée vers l’avenir avec une perspective de développement durable. Une telle attitude implique d’anticiper l’impact de ses investissements sur la qualité de l’environnement.

Avec de pareilles considérations, le gouvernement Trudeau refrénerait ses investissements dans le pétrole des sables bitumineux et le gouvernement québécois offrirait à l’Alberta de la soutenir dans la diversification de son économie.

Cette pandémie ne réjouit pas les écologistes, même si elle révèle dramatiquement les effets de notre grande négligence à l’égard de la planète. Elle confirme d’autre part la nécessité d’une intervention de l’État pour prendre le virage du développement durable.

Comme Christian Payeur et la Fondation Monique-Fitz-Back, je préfère compter sur la conscientisation et l’action citoyenne des jeunes pour influencer nos décideurs plutôt que d’attendre la multiplication des pandémies pour assainir la planète !

 

Par RÉJEAN PARENT

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